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Ahmad le Terrible

Chroniques du Nancy Jazz Pulsations 2006 – Episode 3
Mercredi 18 octobre – Chapiteau de la Pépinière – Nancy


A l'annonce de la première partie - le trio réunissant André Ceccarelli (batterie), Joey Di Francesco (orgue) et Bireli Lagrene (guitare), Mr Monstrueux m'avait prévenu, surlignant son propos d'une moue un tantinet dubitative : je serais probablement déçu et il me faudrait probablement me contenter d'un super boeuf entre musiciens de grand talent qui nous proposeraient, à n'en pas douter, une série de standards... Hé hé ! Force est de reconnaître que le bougre n'avait pas tort. D'abord pour ce qui concerne le répertoire : ce fut effectivement une succession de standards (Nardis, Sophisticated Lady, Summertime, ...) interprétés avec brio mais sans cette étincelle de folie qui fait qu'un concert reste gravé longtemps dans nos mémoires. On sait où l'on est, on sait par avance où l'on va, mais on attend en vain le virage un peu brusque qui nous fera nous agripper à la portière dans la montée d'un col de haute montagne. Ici, c'est une conduite impeccable, la trajectoire est propre, la tenue de route excellente, mais... c'est conduite pépère tout de même. Et je le répète : ces trois artistes ont beau être de brillants instrumentistes, on est forcément déçu lorsque, happé dans l'ambiance si particulière du festival et plus particulièrement sous le chapiteau, le répertoire proposé n'est pas à la hauteur du moment. Autant on l'aurait volontiers dégusté dans un petit club de jazz en papotant tranquillement avec quelques amis autour d'une table, autant la même prestation dans ce cadre plus solennel semble un peu décalée. Et puis... je dois bien l'avouer, je reste toujours aussi insensible au jeu de guitare de Bireli Lagrene : virtuose oui, intsrumentiste de premier plan, oui encore mais... souvent trop de notes, comme s'il lui fallait impérativement combler tous les silences qui risquent d'interroger l'oreille de l'auditoire ! Ah, les charmes de l'entre notes ! Ici, il n'en fut pas question.
Par conséquent, lorsque le second trio de la soirée fit son entrée sur scène, nous étions affamés de musique, bien loin d'être rassasiés par ce que nous venions d'écouter. Autant dire qu'avec Ahmad Jamal, nous allions changer de catégorie. Là, c'est un grand coup de piel au cul céleste qui, en quelques minutes, nous propulsa illico par dessus les nuages d'où les sphères musicales sont si belles à contempler. Le jeu de piano de ce grand monsieur (qui a dépassé les 75 ans je crois) est toujours aussi parfaitement identifiable, il martèle les touches avant de s'interrompre brusquement pour les caresser, les syncopes se multiplient, la complicité avec ses deux compères est jubilatoire. James Cammack tisse un énorme tapis de velours rythmique avec sa contrebasse pendant que l'infatigable Idriss Muhammad propulse cette belle machine rythmique avec cymbales et fûts (mention spéciale à sa tenue : béret blanc et lunettes rouges à larges montures qui lui donnaient un petit look façon Michel Serrault dans "La cage aux folles"). Nous avions enfin notre compte de musique. Ce fut un de ces moments de grâce dont on n'est jamais certain qu'on pourra les revivre un jour à nouveau. Et qui, vous vous en doutez, a filé à la vitesse de l'éclair. Comme toujours.

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