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Y a des écologifles qui se perdent...

La scène se passe en fin d'après-midi, voici quelques jours, en ma belle ville de Nancy. Alors que je rentrais chez moi en voiture – un véhicule que j'utilise avec la plus extrême des parcimonies, lui ayant toujours préféré la marche urbaine – j'aperçus, venant dans l'autre sens et piaffant d'un moteur impatient au feu rouge, une voiture italienne arborant un petit cheval, flambant neuve, décapotable, conduite par un superbe prototype de "kéké" qui eut tôt fait de démarrer dans un rugissement de tous ses canassons moteurs, donnant l'impression à ses voisins de file d'attente l'impression d'être comme scotchés au bitume. J'eus à peine le temps d'apercevoir l'individu qui pilotait l'engin mais durant un instant, je fus gagné par un certain découragement.

Oh, je vous arrête tout de suite… Je ne suis pas envieux, mais alors là, pas du tout ! Le type, là, avec ses lunettes de soleil collées au front, sa barbe de trois jours et sa chemise blanche au col grand ouvert sur une chaîne en or – si si, je vous assure, le mec, il était comme ça, si j'avais eu le temps de le voir plus longtemps, je pense que j'aurais débusqué un téléphone portable collé à son oreille – il peut se payer tout ce qu'il veut avec son argent, je m'en tamponne le coquillard ! Qu'il s'achète une voiture coûtant 100.000, voire 200.000 euros si ça lui chante, je n'en concevrai pas la moindre esquisse de début de commencement de soupçon de jalousie, loin s'en faut. C'est pas mon style.

Non, le problème est ailleurs. Allez, puisqu'on en est au stade des confidences, je vais vous expliquer. Voici en effet des années et des années que, comme le plus couillon de tous les couillons, je ne fais pas couler l'eau du robinet pendant que je me brosse les dents ou que je me savonne les mains, je ne prends que des douches et jamais de bain, je règle la température de ma chaudière à un niveau raisonnable, inférieur même aux préconisations de tous les chasseurs de gaspi, j'éteins la lumière quand je quitte une pièce, je me méfie comme la peste des lampes halogènes, j'achète petit à petit des ampoules basse consommation, je laisse en veille le strict minimum d'appareils électroménagers, je trie mes déchets, j'ai même un bac à compost, je n'utilise ma voiture que lorsqu'il m'est impossible de faire autrement – il faut que le distance ne soit pas inférieure à deux ou trois kilomètres pour que je me convainque de ne pas la parcourir à pied, je ne conduis que des véhicules à très raisonnable consommation d'essence, j'évite quand je le peux les autoroutes où l'on roule trop vite – de toutes façons, les chauffeurs de camions du monde entier ont définitivement rendu ces axes infréquentables et plus que dangereux… bref, je suis le mec le plus discipliné qui soit et je n'ai pas attendu que la Terre se réchauffe dangereusement pour appliquer consciencieusement  quelques règles de bon sens à mon quotidien. Tiens, c'est même encore plus élaboré et subtil chez moi : ma santé ne m'a jusqu'à présent pas autorisé les longs voyages en avion, ce qui fait qu'on ne peut même pas me compter au nombre de tous ces touristes qui vont chercher le soleil à l'autre bout du monde et pour cela, brûlent des quantités phénoménales de kérosène et contribuent eux-mêmes à l'effet de serre qu'ils dénonceront avec la plus grande fermeté. Je ne fais même pas partie des touristes skieurs qui pestent quand la neige encombre les routes qui les mènent jusqu'aux pistes des stations et râlent quand elle n'est pas tombée suffisamment pour leur permettre de jouer. Alors qu'ils pourraient être traversés par l'idée que, peut-être, la montagne en hiver, c'est un univers qui aurait besoin de se régénérer et se dispenserait volontiers de leur manège désenchanté. Je suis un marcheur alpin estival, tout bêtement, et j'ai dû me résigner à ne plus compter les engins de chantiers qui défigurent le paysage pour préparer encore et encore de nouvelles pistes destinées à nos champions d'une semaine. Vous voyez bien, je suis un type qui mène une vie quasi ascétique et sait souvent se contenter de plaisirs simples.
 
N'empêche. Ce connard, là, au volant de son attentat écologique, en quelques mètres il aura brûlé autant d'essence que moi en plusieurs kilomètres et je suis certain qu'en plus, il est fier de ses exploits. C'est comme le type, là, qui se gare souvent dans ma rue. Vous savez quoi ? Il conduit un Hummer, oui oui, le gros truc que l'armée américaine utilisait pendant la première guerre du Golfe. Déjà qu'il est pas fichu de se garer correctement et qu'il se sent obligé de stationner à moitié à cheval sur le trottoir – ce qui, j'en suis certain, le convainc de la nécessité de piloter une telle chose – il faut en plus qu'en une semaine à lui tout seul, il pompe toute l'essence d'une station.
 
Faut vraiment être motivé parfois face à l'insouciance et à la stupidité d'une partie de nos concitoyens. Il y a des jours où je me demande à quoi ça sert, tous ces petits efforts qu'on accumule, tous ces petits gestes qu'on effectue avec l'idée que "les petits ruisseaux font les grandes rivières". Surtout que je me demande souvent ce que je pourrais faire de plus pour être un bon citoyen. Et pendant ce temps-là, les crétins à moteur paradent et pétaradent, confondant visiblement leur levier de vitesse avec leur quéquette.
 
Pfff… j'arrête, je sens que je deviens un vieux con. Ah mais qu'est-ce que ça fait du bien !

Commentaires

  • kéké 5-4!!!

    t'as ben raison!

  • Et bien, je suis comme toi, je fais attention car je suis consciencieuse....
    Bon week end.

  • Je me faisais la même réflexion hier mais, dans mon cas, il s'agissait des petits c... qui roulent en ville avec leurs scooters pétaradants et au moteur gonlé! Et eux ils n'ont même pas l'excuse d'avoir de l'argent à n'en savoir que faire! Bon, d'accord, ils sont jeunes mais, comme disait Tonton Georges, "Le temps ne fait rien à l'affaire...".

  • @ Elisabeth : oui, consciencieux, c'est le terme qui me paraît le plus juste. D'ailleurs, j'ai failli appeler cette note : "Con... sciencieux ?"

    @ Quiet Man : c'est toujours la même histoire en fait... Qu'ils soient adultes, ados ou qu'ils soient ce qu'ils veulent d'ailleurs, tout cela me laisse penser qu'il s'agit d'une question de virilité mal assumée... Mais bon, on ne va pas se la jouer "psychologie de supermarché"

  • La psychologie de supermarché : cela me fait bien rire ! On ne va pas s'y mettre, hein ?
    Oui en fait, ces personnes veulent dire "j'existe, regardez-moi ..."
    Bonne journée.

  • C'est vrai que c'est décourageant, ces "kéké" rencontrés régulièrement, mais dis-toi que nous somme plusieurs à essayer d'être conscient de la rareté de notre environnement. C'est réconfortant de ne pas se sentit seul.
    En tout cas, bravo encore pour ta finesse d'analyse. J'ai particulièrement savouré le passage sur les sports d'hiver.

  • @Jean-Marc : merci pour ton commentaire... en attendant le jour où je pourrai venir faire un petit tour sur ton propre espace !

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