D’ailleurs, je n’ai pas attendu bien longtemps avant de me mettre au travail, mais en silence moi, môssieu. Car quand je m’active, c’est avec doigté et délicatesse, je suis un méticuleux du nettoyage. Oui, parce que mon paysagiste jardineur ne pourra pas intervenir avant l’automne. Je ne sais même plus pour quelle raison. Trop de boulot ? Pas la bonne période ? Ou les deux ? D’ici là, vais-je devoir contempler le spectacle de la nature en folie depuis la fenêtre de ma cuisine, n’osant pas mettre un pied sur ce sol hostile ? PAS QUESTION !
Donc, hier, profitant du seul rayon de soleil de la journée – durée approximative : une minute et trente secondes – en ce beau printemps lorrain, à inscrire très probablement dans un futur livre des records de la météorologie, j’avais décidé de déguster un bon café en extérieur. Plateau au bout du bras, puis posé sur le muret humide, je pestais tout en sirotant mon breuvage contre cette végétation luxuriante, fruit de la négligence d’un ancien propriétaire qui, semble-t-il, n’avait jamais posé les pieds en ce lieu si particulier, ainsi que de conditions météorologiques favorables à la pousse ultrarapide de tous mes hôtes sur troncs. De l’ombre, de l’ombre, de l’ombre, rien que de l’ombre. Non, les choses ne pouvaient plus durer ainsi.
Ni une ni deux, je filai à toute allure dans mon garage pour rapporter une échelle, puis dans le cellier pour y attraper la scie à bois prêtée par mon voisin – tiens, faites-moi penser que je dois la lui rendre – et commençai à élaguer tranquillement les deux branches parasols du bouleau pleureur coupable de l’obstruction qui me désespérait tant. Et hop, avec La Fraise et son English Lad à la réception, tout doucement, le panorama commença à s’éclaircir. On était bien loin du compte, mais l’amélioration obtenue en quelques secondes était très spectaculaire et surtout particulièrement encourageante. J’avais l’impression qu’on sortait tranquillement de la nuit pour entrer dans une grisaille bienvenue. Pas de doute, avec ce chapeau en moins au-dessus de nos têtes, on devinait tout le potentiel que recelait cet are urbain une fois qu’il serait complètement dégagé. C’est dire que ce premier travail ne fit qu’aviver mon impatience et c’est à ce moment que, mû par une drôle d’urgence bûcheronneuse, je décidai d’engager une lutte sans merci avec cet arbre coupable dont j’avais déjà bien réduit la capacité de nuisance. Plaçant ma scie à l’horizontale, à environ cinquante centimètres au-dessus du niveau du sol, je commençai à scier, un peu dubitatif tout de même quant à mes chances de réussite. Mais là, Ô miracle, le bois tendre du bouleau ne m’offrit pas la moindre résistance et je vins à bout de l’impétrant en quelques secondes seulement, dans un fracas de branches venant s’écraser sur différents pots de fleurs placés là par une main délicate, celle de Madame Maître Chronique.
TIMBEEEEEER !!!!
Qui c’est qu’a gagné ? C’est moi !!! A terre le bouleau, sèche tes larmes, t’en as fini de pleurer et de nous plonger dans la nuit diurne dont tu avais le secret.
OK, j’avoue, maintenant c’est un peu le bazar parce qu’il a bien fallu pousser sur le côté toutes ces nouvelles branches mortes et leur cortège de feuilles envahissantes, histoire de voir enfin à quoi pouvait ressembler un jardin normal : sans herbe, sans arbre, sans trop de feuilles, juste quelques plantes pour faire joli et en attendant un beau dallage au soleil. Mais là, on voit mieux, même que le soleil a fait une nouvelle apparition, dardant ses pauvres rayons jusqu’à l’extrémité de notre enclos.
Et le premier qui me fait une réflexion sur l’oxygène, la chlorophylle ou je ne sais quel machin d’écolo vert, je le chope et je le coupe en deux. Dans la vie, faut parfois prendre des décisions. De toutes façons, c'est bien connu : les prisonniers du bouleau font pas de vieux os !!!