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WHAT ELSE ? - Page 19

  • Mon chirurgien est en pleine forme !

    J'ai reçu hier soir un coup de téléphone du Docteur D., celui qui va bientôt m'implanter mon nouveau pace maker. De retour d'une semaine de vacances, il s'est bien entendu enquis de mon état a-stimulé et m'a longuement parlé de son séjour du côté de Méribel, l'une des stations de cette belle région qu'on appelle « Les Trois Vallées ». Il est de retour et il va très bien, merci pour lui.

    Tiens, le plus amusant, ce serait d'essayer de vous reconstituer au mieux notre savoureux dialogue. Il flottait dans notre conversation un petit je-ne-sais-quoi de surréaliste qui m'a littéralement enchanté. Et puis, et puis... cette sensation diffuse d'être perçu par le corps médical comme une sorte de petit rat de laboratoire, ... Je ne garantis par l'exactitude de chaque mot prononcé, mais ce dont je suis certain, c'est que ma retranscription en traduit assez fidèlement l'esprit.

    « - Allo ! C'est le docteur D., comment allez-vous sans votre pace maker ?
    - Beuh... pas trop mal, faut dire aussi que je n'ai pas abusé des efforts inutiles...
    - Mais vous avez senti une différence depuis une semaine ?
    - Beuh... ben... je suis resté au calme, j'ai pas fourni d'efforts inutiles...
    - Oh, je reviens de vacances. On a super bien skié, il faisait un temps magnifique. On était à Méribel.
    - Ah oui, je connais bien les Trois Vallées, mais l'été, hein, parce que moi, le ski...
    - Et puis on avait un hôtel à Brides-lès-Bains.
    - Je connais Brides-lès-Bains, c'est là que j'allais faire mes courses au supermarché, au Super U.
    - Une demi-heure en oeuf et hop, on était sur les pistes, c'est pratique. Vous devriez essayer de faire un effort violent, pour voir ce que ça donne.
    - Beuh... je sais comment ça fait, hein ? J'ai déjà pas mal donné... Et puis, je suis allé chez le cardiologue, il a bien vu que ma bradycardie était toujours aussi nette !
    - Ouais, ouais, mais vous savez, je suis certain qu'aujourd'hui, j'arriverais à le remettre en route, votre pace maker...
    - Hmmmouais, vous pensez que vos vacances lui ont fait du bien ? Pas sûr hein, et puis, il a quand même quinze ans.
    - Ah, ben oui, c'est vrai, il a fait son temps et on l'avait donc pas posé pour rien notre pace maker ! Le seul problème, c'est qu'il n'y avait pas énormément de neige. Trop de soleil.
    - Ah bon ? Z'avez eu du beau temps ?
    - Magnifique, mais ça fait fondre la neige.
    - Oui, parce qu'ici, du côté des Vosges, on dirait qu'il y en a assez de la neige et puis, c'était bien, il ne faisait pas trop beau.
    - J'aurai pas le pace maker avant le 1er mars, enfin, le modèle dont je vous ai parlé.
    - Euh... ça fait peut-être un peu long, non ? Parce que j'ai déjà commencé la diminution de mon traitement anti-coagulant, en prévision. On avait dit que mon INR devait passer au-dessous de 2, non ?
    - Oui, c'est bien ce que je me dis. Mais bon, moi, l'INR, je m'en moque un peu, j'ai déjà opéré avec un taux supérieur, ça c'est bien passé. Bon, oui, ça fait long quand même. Oh, Mais y a un autre modèle, équivalent, hein ?
    - Ah ? Et çui là, on peut le poser rapidement ?
    - Oui, début de semaine prochaine ? Oh, on était bien dans notre hôtel, c'était vraiment pratique, on prenait les oeufs et on était tout de suite sur les pistes. C'était une belle semaine de vacances.
    - Euh... ben, ch'sais pas moi, le lundi 13 ?
    - Alors... oui, vous rentrez en clinique le 13 après-midi, on pose le pace maker le 14 et vous sortez le soir ?
    - Oui, c'est bien ça.
    - Non, franchement, le ski juste avant l'arrivée des parisiens, c'était un régal, un temps magnifique, et puis notre hôtel, vraiment très bien. Chambre seul ou à deux ?
    - Euh, ben, euh... plutôt seul si c'est possible, plutôt seul.
    - Bon, ben on se tient au courant, je vous rappelle un peu avant. A bientôt ! »

    C'est tout de même rassurant, vous ne trouvez pas, de savoir que celui qui va pratiquer sur vous une opération – même si pour ce qui me concerne, celle-ci est on ne peut plus bénigne – est au mieux de sa forme ! Et puis, comme dirait ma chère et tendre épouse, quoi de mieux que la perspective d'avoir « un nouveau coeur » le 14 février, soit le jour de la Saint-Valentin !!!

  • "Benêt-volat"

    Y a des jours, comme ça, où je me dis que je suis tout de même un peu con ! Je m'en suis aperçu hier lors de ma visite chez le cardiologue.

    Pour que vous compreniez bien, je dois néanmoins vous apporter quelques précisions sur le contexte : je ne vais pas voir n'importe quel cardiologue. Celui-là fut autrefois le propriétaire de la maison que j'ai louée durant 12 ans (le lieu enchanteur où la Fraise et Saxoman ont vu le jour, fait leurs premiers pas, grandi...), c'est lui qui a veillé sur moi il a 15 ans lorsque j'ai dû me faire implanter ce stimulateur cardiaque en instance de remplacement et nous avons, petit à petit, fait en quelque sorte partie de son cercle familial. Nous étions voisins, nos maisons n'étant distantes que de quelques mètres et nichées dans un magnifique coin de verdure quelque part à Nancy. Mais je suis aussi devenu pour lui une sorte de "conseiller informatique", lorsqu'il a commencé à s'équiper en Macintosh et en PC, j'ai formé sa secrétaire, j'ai toujours veillé par ailleurs à ce qu'il bénéficie des services des prestataires les plus compétents. Et je suis resté pour mon cardiologue une sorte de "hot line" bienveillante.

    Hier donc, j'ai dû me rendre à son cabinet pour un petit check-up : je vois d'ici que tous, vous frémissez d'inquiétude ! Non, pas de panique, mon coeur tient le coup, sa forme est plutôt bonne, même si son défaut de fabrication est, lui, bien là : un sinus cardiaque très très paresseux, une pulsation à 50 alors que je ne suis pas au repos et que je ne suis pas spécialement sportif non plus... et qui descend à 35 au plus noir de la nuit. On appelle ça une bradycardie (du grec bradus qui signifie lent... c'est le Littré qui dit ça, donc ça doit être vrai). Une fois débarrassé des mètres cubes de gel qu'il me fallait ôter avec un essuie-tout qui vous gratte les dessous de bras, une fois rhabillé (à ce moment-là, vous vous apercevez que vous avez oublié un bon gros paquet de gel, là, juste au niveau des côtes, qui vient coller à la chemise toute propre que vous aviez préparée pour l'occasion...), me voilà en train de signer un chèque d'un montant fort sympatique ma foi, 101,70€, pour une prestation somme toute assez courte, entre un quart d'heure et vingt minutes. Mais bon... je ne dis rien, c'est un métier, cardiologue...

    A peine rechaussé, voilà t-y pas que mon spécialiste m'appelle du fond de son local d'examen (hum hum, j'ai l'impression que le coup était prémédité parce qu'il n'y avait pas de client après moi...) avec un air un peu ennuyé pour m'expliquer qu'il avait un gros souci : pas moyen d'enregistrer avec le graveur de DVD connecté à son échographe. "Ca ne marche pas, j'obtiens juste une image complètement pixellisée, je ne vois rien"... Un problème ennuyeux pour lui, parce qu'il semble maintenant obligatoire pour ces professions médicales de garder une trace informatisée de leurs examens. Il fulmine contre le mode d'emploi qui lui présente une télécommande avec des touches que lui, ne voit pas sur la sienne. "C'est quand même incroyable, je n'ai pas la même télécommande que sur le mode d'emploi...". OK, chef, on va voir ce qu'on peut faire... Je vérifie les branchements, c'est bon de ce côté là ; je regarde les principales commandes du graveur de DVD et commence à me pencher sur le cas de cette drôle de télécommande. Je compare scrupuleusement avec le dessin du mode d'emploi et, hop là ! Je fais coulisser vers le bas la partie inférieure de la zappette et que vois-je ? Les touches mystérieuses ! Ô miracle ! Quel talent ! Du coup, l'utilisation du graveur de DVD s'en trouva fort simplifiée et après deux ou trois essais et exercices pratiques concluants, je n'eus aucune difficulté à convaincre mon cardiologue qu'il allait maintenant devenir un expert en maniement des images archivées.

    La seule différence, c'est que ma prestation fut on ne peut plus bénévole... Vous imaginez l'intervention d'un spécialiste, le déplacement... J'ai fait un rapide calcul et je me suis rendu compte que même en divisant par deux mon tarif par rapport au sien, il me suffirait de travailler moins de 20 heures par mois pour toucher le même salaire brut que celui que l'Education Nationale me verse généreusement.

    C'est là que je me suis trouvé un peu nigaud tout de même. Ah, le bénévolat, c'est bon pour les consciences mais alors, pour le porte-monnaie, c'est pas le pied !

  • Pour nos châteaux, chinons...

    Maintenant que je suis propriétaire d'une maison, il est un rendez-vous télévisuel que je me dois de ne manquer sous aucun prétexte, l'émission « Question maison », diffusée sur France 5, la chaîne des profs (euh, notez bien, je ne suis pas prof, mais par ici, il y en a une forte concentration, alors ça crée quelques obligations professionnelles...), le dimanche à 20 heures. Avant, je n'en avais pas le droit puisque ne possédant qu'un appartement, j'aurais eu l'impression de resquiller, de m'immiscer dans un univers dont je ne faisais pas partie. Et puis, j'avais beau chercher dans les programmes de mon magazine de télé favori (enfin... il m'énerve quand même un peu celui-là, je l'achète parce que justement on n'y parle pas que de télé, mais des fois, ce serait bien si les journalistes voulaient bien se décoincer une fois de temps à autre... vous voyez duquel je veux parler ? Eh les copains, vous avez le droit de rigoler de temps en temps, c'est pas une maladie honteuse le rire...), nulle trace de « Réponse appartement » ou quelque chose dans ce genre-là. Donc, dès mon titre de propriété en poche, je me suis vautré dans mon canapé et là, j'ai savouré le bonheur d'être un possédant, j'ai pris mon calepin et mon stylo et n'ai pas perdu une miette d'une heure hebdomadaire qui est un bonheur sans égal !

    Le seul truc qui me gêne, c'est que juste avant, y a un programme de jardinage avec un présentateur auquel j'ai envie de filer une paire de baffes tellement il est insupportable et une co-animatrice qui se croit obligée d'arborer des tenues adaptées à la situation, bref habillée comme un sac de compost. Et entre les deux, une séquence musicale et des chanteurs avec des guitares et des textes qui ont tendance à se la péter un peu, comme on dit de nos jours...
    Mais revenons à nos moutons, ou plutôt à notre maison...

    Il y a d'abord le présentateur, Stéphane je ne sais plus comment, qui nous dit avec conviction le sommaire tout en arpentant énergiquement les abords de la maison qu'il va nous proposer de découvrir. Lui, c'est un type simple, il prépare ses émissions à fond, ça ne fait aucun doute, mais il le fait tellement bien qu'il répond à ses propres questions à la place de ses interlocuteurs quand il les interroge. On voit qu'il a longuement discuté, qu'il s'intéresse vachement, il est bien documenté... sauf que ça nous donne un dialogue assez étrange, où le questionné n'a d'autre solution que de répéter platement dans le mode affirmatif ce qu'il vient d'entendre en mode interrogatif :

    - Alors là, vous avez choisi une peinture bleu canard pour tous les murs du rez-de-chaussée ?
    - Oui, j'ai choisi une peinture bleu canard pour tous les murs du rez-de-chaussée.
    - C'est formidable, le revêtement de votre cuisine, on dirait du métal, mais en fait, c'est une imitation en plastique.
    - Oui, c'est une imitation en plastique.
    - C'est beaucoup plus facile à entretenir ?
    - Oui, c'est beaucoup plus facile !

    Et comme ça, pendant toute la visite des lieux... Car le fil rouge de l'émission, c'est la découverte d'une maison (en général de la taille d'un château, ou, plus modestement, un petit 250m2 en plein coeur de Paris avec jardin bien sûr), dont le prix de revient final n'est jamais évoqué. C'est la maîtresse de maison qui nous accueille (oui, pourquoi c'est toujours une madame ?), elle a la petite quarantaine, elle est toujours décoratrice d'intérieur ou exerce un métier prétendu artistique, elle a de jeunes enfants a qui elle a aménagé des chambres beaucoup plus exiguës que son dressing, et pour tout dire, elle est la plupart du temps fort antipathique, voire un tantinet condescendante. On la devine mariée, on subodore que l'époux n'est pas sans revenus, loin s'en faut, mais le conjoint est systématiquement invisible. Interdit de séjour et je soupçonne notre Stéphane d'entretenir avec ses hôtes de coupables relations aldutérines ! Le mari, il ramène les brouzoufs à la maison pendant que madame décore, ponce, repeint et... chine !

    Attention, mesdames et messieurs, vous êtes là au coeur de l'émission !!! Oui, car ces dames de « Question Maison » ont toutes une passion dévorante : elles ne vont jamais taquiner le brocanteur pour marchander, elles n'usent pas leurs semelles aux puces, non non non ! Elles CHINENT ! C'est incroyable ce qu'elles peuvent chiner nos copines de Stéphane, y a pas un objet dans une pièce qui n'ai été chiné (sauf s'il est le résultat d'un de leurs spendides travaux personnels, il faut bien l'avouer ou, comme l'autre jour, le fruit d'une découverte via Internet. Notre hôte d'un soir s'était prise de folie pour des têtes d'animaux illuminées qu'elle avait installées en appliques et achetées à un créateur en Afrique du Sud. Faut aimer quand même...). D'ailleurs, si vous regardez un jour l'émission et que votre intérêt retombe petit à petit au fil des minutes, ce qui n'est pas impossible, vous pourrez toujours vous amuser à compter le nombre de fois où le verbe chiner (sous toutes ses déclinaisons) aura été prononcé (surtout que, comme je vous l'ai déjà expliqué, l'animateur aime énormément inclure les réponses dans ses questions... donc, faites gaffe parce que des fois, ça sort en rafales), vous verrez, ça occupe bien. Celui qui gagne a le droit de réciter le verbe chiner à l'imparfait du subjonctif !

    Et puis, et puis... la séquence culte de l'émission, la rubrique que vous connaissez tous... mesdames et messieurs, j'ai nommé « Le SOS maison » ! Alors là, silence dans les rangs, c'est un must. Le principe est simple : vous, modeste propriétaire d'un appartement de 13m2 dans lequels vous circulez difficilement, vous, votre mari et vos enfants, vous souhaitez qu'un magicien de l'aménagement intérieur, trouve LA solution à tous vos problèmes de rangement. C'est très simple, vous écrivez aux responsables de l'émission et, moyennant une chance sur 2500 que votre dossier soit retenu, vous avez le plaisir d'entendre votre carillon sonner : « Bonjour, Philippe Demougeot, SOS Maison » et tatata, c'est parti ! Le monsieur, comme ça, en deux secondes, vous fait un sublime croquis de votre intérieur (il m'énerve celui-là, à dessiner aussi bien, j'ai même remarqué un truc, il arrive toujours à bien gommer, jamais le papier ne se froisse...), avant et après les transformations (bon, faut être honnête, on voit bien que le type est déjà venu faire un sérieux repérage et que son entrée est un peu bidon, mais le moyen de faire autrement ? L'émission, elle peut pas durer trois semaines, hein ?) et vous demande ce que vous en pensez. Là, c'est l'unanimité : « Roooh ! C'est fantastique ! ». Moi, j'attends toujours la réaction de celui ou celle qui va dire : « Beuh non, c'est nul ton truc ! J'veux pas de mini-bar derrière le frigo et pis, les murs en placo peints en violet avec les spots qui nous brûlent les cheveux, ben j'aime pas trop. Et t'as vu où tu me fais dormir les mômes ? Dans notre chambre (hé, ducon, y a qu'une chambre... tu veux qu'on les mette où, tes mômes ?), même pas caché derrière un voile mauve, on voit tout à travers. Tu parles, dans un an, il va nous mater, on fera quoi à ce moment-là ? ». Faut dire que c'est l'émission qui paie, ou plutôt c'est le sponsor, une grande chaîne de bricolage dont le nom évoque un enchanteur, alors ça limite quand même les critiques ! « Ah bon, ça vous plaît pas, mon rangement coulissant sous la table du salon qui sert de bureau pour votre ordinateur ? Ben t'as qu'a te payer les travaux toi-même, banane ! ». Nous, on a bien essayé de proposer des travaux pour notre nouvelle maison, mais on attend toujours la réponse et puis, je crois bien qu'il est trop tard. Peut-être aussi qu'on était un peu gourmands, z'ont sûrement pas voulu financer 15.000 € de travaux... Faut dire que comme c'était gratuit, on avait mis le paquet : escalier intérieur, rénovation de l'électricité, papiers peints, portes de placards et tout le toutim... J'espère qu'ilsvont pas se réveiller maintenant, parce que c'est trop tard, on a commencé le chantier...

    Voilà, vous savez l'essentiel de « Question maison ». A la fin de l'émission, assis à côté de son hôte qui a du mal à réprimer un baillement, notre Stéphane  nous fait un peu de publicité pour quelques gros livres, très chers et avec beaucoup d'images, vous savez, ceux qu'on feuillette une fois et qu'on n'ouvre plus jamais et puis... raah, c'est fini ! Il faut attendre la semaine suivante.

    Vous ne me croyez pas ? Rendez-vous ICI, on peut même regarder l'émission sur Internet !

    PS : comme en écho à cette note que j'avais écrite depuis quelque temps déjà, France 2 nous proposait hier soir dans son journal de 20h un reportage consacré à quatre jeunes salariés en CDD qui ne parviennent pas à se loger. Trop cher, les bailleurs veulent du CDI, bref la galère. La seule solution qu'ils aient trouvé pour l'instant consiste à louer une caravane qu'ils ont aménagée avec les moyens du bord. Pas de chauffage, pas d'eau courante, tout cela dans un hangar sinistre. Ce serait bien si madame Chineuse et monsieur SOS maison venaient leur donner un petit coup de main, non ?

  • Défaut intelligence

    C'est quand même extraordinaire : alors que samedi j'étais un citoyen lambda des plus ordinaires, j'entends par là que rien ne me dissociait a priori de la grande majorité des gens de par mon mode de vie, je dois à nouveau me glisser dans la peau d'un malade, tout cela parce que mon crétin de pace maker a décidé de prendre un congé sans solde, sans donner le moindre préavis. Je ne vous cacherai qu'étant un adversaire assez redoutable de toute forme de maladie (ma thrombo-phlébite géante de l'année 1979 s'en souvient encore, elle a voulu me faire passer l'arme à gauche quand j'avais 21 ans mais, t'are ta gueule à la récré, ma vieille, je suis toujours debout et je t'emmerde... 1000 excuses pour cette grossièreté mais avec ce genre d'ennemis, seule la force fait loi), je supporte assez mal d'être obligé de me couler dans ce moule médicalo-assisté auquel je ne peux pas toujours échapper, parce que je suis somme toute un être humain assez raisonnable...

    Il faudra que j'arrête de balancer plein de trucs entre parenthèses et que je songe à raccourcir mes phrases, vous ne trouvez pas ?

    J'ai entamé hier après-midi mon petit marathon personnel qui me fait rendre visite à différents médecins ou éminents représentants du corps médical : ma généraliste tout d'abord (paraît que c'est obligatoire maintenant avant de voir n'importe quel spécialiste) avec laquellej'orchestre pour demain une visite chez mon cardiologue (ben oui, parce qu'avant, c'est certain, de temps à autre, je me disais : "tiens, quoi faire aujourd'hui ? Oh, chouette, je vais aller chez mon cardiologue !" Dis, m'sieu le ministre de la Sécu, tu crois vraiment qu'on va voir un cardiologue dans le seul but d'aggraver ton déficit ?), puis une modification régulée de mon traitement anti-coagulant (j'avais oublié de vous raconter ça, mais avec un sang très liquéfié, on ne peut pas sans risque se faire charcuter...) qui va nécessiter un contrôle sanguin vendredi matin, puis un nouvel entretien avec ma généraliste qui, au vu des résultats, optera probablement pour une seconde modification entraînant elle-même un nouveau contrôle sanguin lundi matin. C'est bon, vous me suivez ? Et puis lundi, je dois faire le point avec mon chirurgien pour savoir quel jour il peut remplacer mon stimulateur, sachant qu'il me réserve je ne sais quel modèle "Medtronic" des plus perfectionnés, déjà commandé semble-t-il...

    Par conséquent l'ennui ne me guette pas. Et j'ai sur le grill quelques notes à rédiger sur mon blog : j'ai commencé un petit texte consacré à Terry Riley, il faut aussi absolument que je vous parle de Franck Zappa, j'ai enfin en chantier une petite chronique consacrée à une émission de télévision... and so on ! Et j'ai promis à Saxoman la mise à jour de son site Web.

    Pour couronner ce brillant emploi du temps, j'aurai aussi du pain sur la planche du côté de la maison Magma. Stella m'a longuement téléphoné hier pour prendre de mes nouvelles et nous avons bien sûr parlé de l'activité du groupe. Un DVD va bientôt sortir (fin mars probablement), il sera le premier d'une série de quatre qui verront le jour en 2006 et qui retraceront les quatre semaines de concerts que le groupe avait donnés l'an passé au Triton, en revisitant la quasi-intégralité de son répertoire et en appelant pour l'occasion des membres "historiques" tels que Klaus Blasquiz, Jannick Top ou Benoît Widemann. Comme d'habitude, c'est à moi que sera confié le soin de réaliser les pages de présentation de ces DVD sur le site Internet du groupe et d'orchestrer une petite campagne de communication.

    C'est tellement mieux ainsi ! Dire que l'inactivité me pèse est bien peu... C'est plus fort que moi, il faut que je crée, que j'imagine, j'ai besoin de projets en permanence et le rallye médecin-cardiologue-laboratoire-médecin-chirurgien ne m'enthousiasme pas vraiment.

    Ah, y a un autre truc chouette : j'ai déposé mon arrêt de travail au boulot hier et en bavardant avec quelques uns de mes collègues, je me suis rendu compte que j'avais échappé à une réunion de service, modèle du genre, guidée pour certains par une ligne de conduite très simple : "j'en fais le minimum, je raconte des bobards avec assurance, je refile le boulot aux autres et j'ouvre ma grande gueule !". J'en connais, s'ils étaient des chaudières, y aurait le message "DEFAUT INTELLIGENCE" qui s'afficherait en gros sur leur sourire hypocrite.

    Rien qu'à y penser, je sens que mon pace maker aurait envie de redémarrer tout seul... Du calme, cheval, du calme... Tu m'as laissé tomber, c'est bien fait pour toi, j'attends ton remplaçant. Trop tard pour avoir des remords, fallait y penser plus tôt !

  • Inactivité

    Faut que je m'habitue... Vivre au ralenti en attendant le sésame électronique qu'on m'a promis pour la semaine prochaine.
    M'adonner à quelques tâches domestiques, ben oui, quand même, je ne vais pas rester à la maison et attendre, les pieds sous la table, qu'on vienne me servir. Je veux bien calmer le jeu, comme on dit, mais pas devenir un parasite !
    J'en profite aussi pour faire le point. Je me dis que je suis parvenu à un âge où je ne dois pas culpabiliser sous prétexte que je ne vais pas travailler durant quelques jours. Au moins, j'ai une bonne raison que personne ne viendra me contester. N'empêche, brutalement, je me sens inutile et je pense forcément à tous ceux que la société rejette brutalement et qui, eux, ont mille fois plus de raisons que moi de ressentir cela.
    Il faut que je fasse du rangement aussi, dans la bibliothèque musicale qui est stockée sur l'un de mes disques durs. Je classe, j'indexe, j'en profite pour ré-écouter quelques vieilleries qui n'ont pas pris une ride. Tiens, faites-moi penser que je dois vous dire prochainement deux mots du compositeur américain minimaliste Terry Riley. Ecoutez donc son « A rainbow in curved air ».
    Et comme je suis une personne dotée d'un minimum de conscience professionnelle, je vais aussi m'attaquer à la rédaction d'un dossier sur l'entrée des jeunes dans la vie active en Lorraine. J'ai trois semaines pour le boucler. La technologie contemporaine me permet en cas d'urgence de recourir à ce télé-travail.
    Envie d'écouter en rafale la bonne quinzaine de disques du groupe de jazz-rock Weather Report, avec Joe Zawinul et Wayne Shorter. C'est plein d'énergie.
    Je crois que je regarderai un épisode des « Brigades du Tigre », ce sera ma Madeleine de Proust de la journée. Et puis, avec cette série, j'avais l'impression d'apprendre quelque chose, chaque épisode était bien situé dans un contexte et des événements historiques précis. Et j'adore les poursuites de voiture à 25 km/h !
    Demain, c'est promis, je m'attaque à la mise à jour du site Internet de Saxoman, depuis le temps qu'il me fait remarquer que pas mal de pages sont périmées.
    Envie aussi de laisser tomber certaines choses, je me rends compte que quelques activités ont bouffé pas mal de mon temps, je ne sais même pas si elles en valent la peine. Je me demande si je ne vais pas laisser tomber le Press Book de Magma sur Internet. Il faudrait que quelqu'un prenne le relais. Je ne suis plus très motivé. Fatigué surtout de certaines histoires.
    Raah, et puis il y a tous ces bouquins que je voudrais lire, ou relire. Il faut que je termine la série des romans de John Harvey et de son inspecteur Charlie Resnick.
    Il fait un froid de canard dans cette région, heureusement le soleil est de la partie. Mais j'ai des envies de Languedoc-Roussillon, de Bretagne, de Pays Basque...
    Envie de cinéma aussi.
    Finalement, je me demande si tout n'ira pas mieux quand j'aurai repris le boulot. Au moins, le cadre est fixé, les journées passent à vitesse grand V et je ne prends pas le temps de réfléchir.
    Je ne suis pas inquiet le moins du monde, cette opération est on ne peut plus bénigne. C'est juste cette dépendance à un objet qui, au-delà du bien fou qu'il vous procure lorsqu'il fonctionne, m'énerve un peu...

  • Mort d'un compagnon

    « Ça faisait presque 15 ans que nous ne nous étions pas quittés, très attachés l'un à l'autre, lui a l'écoute permanente de mes moindres mouvements, moi le protégeant de toutes les agressions extérieures. Au début de notre histoire pourtant, nos relations furent un peu conflictuelles, sa présence m'était plutôt désagréable, j'avais l'impression qu'il cherchait à s'imposer dans ma vie alors que j'étais certain de pouvoir me débrouiller sans lui. Et puis le temps a fait son oeuvre, j'ai compris qu'il ne me voulait que du bien et qu'en cas de coup dur, il serait là, à veiller sur moi. C'est vrai qu'il ne m'a jamais laissé tomber, qu'il était devenu au fil des mois et des années comme un alter ego, invisible mais terriblement stimulant...
    Il est parti brutalement samedi matin, je le savais condamné mais les médecins m'avaient promis qu'il en avait encore pour quelques mois... Depuis, je vis comme au ralenti, sa présence me manque énormément, je ne suis plus le même. »

    COUPEZ ! STOP ! C'EST NUL ! C'EST QUOI CETTE HISTOIRE ?

    Oh, qu'est-ce qu'il a, lui ? Qu'est-ce qu'il n'aime pas dans mon histoire ? C'est gnan-gnan ? Ça va faire pleurer dans les chaumières ? Faut évacuer les sentiments, peut-être ?

    JE VEUX DES FAITS, RIEN QUE DES FAITS... TES ÉTATS D'ÂME, ON S'EN BAT L'OEIL AVEC UNE QUEUE DE SARDINE, MON GARS !!!

    L'est rigolo, lui... Des faits, des faits... Je suis pas journaliste, moi, déjà que j'arrive même pas à être écrivain... J'essayais juste de dire les choses comme je les ressens de l'intérieur, c'est une façon de ne pas me cacher, de dire tout cela au mieux. Des faits, des faits, il en a de bonnes... Bon, j'essaye...

    « Samedi 28 janvier, 11h30, Polyclinique de G. à N.
    Nous sommes arrivés à l'heure prévue, et dès notre entrée dans le hall, le docteur D. est venu à notre rencontre. A peine sommes-nous installés sur la table d'examen que celui-ci laisse échapper un juron après le lancement de son premier diagnostic :
    Merde, je l'ai perdu, je n'ai plus de réponse !
    Je le vois qui commence à s'agiter, il interroge son écran, cherche une solution pour le ramener à nous mais on dirait que la cause est entendue, il ne pourra rien faire. Ayant pour habitude de ne jamais renoncer, il tente une ultime manoeuvre et arrête toute l'alimentation électrique de son appareil de contrôle. Il voit bien que je suffoque, que je me sens comme pris à la gorge, j'ai l'impression d'avoir perdu le contrôle de moi-même. C'est une sensation extrêmement désagréable, non pas douloureuse, mais très proche d'un étouffement qu'on ne parvient pas à juguler. Je commence à avoir un peu peur... »

    OH ! TU VAS PAS EN PLUS T'APITOYER SUR TON SORT, ON T'A DIT QU'ON S'EN FOUTAIT DE CE QUE TU RESSENS ! UN PEU DE RECUL, DE DERISION... MERDE, C'EST PAS COMPLIQUÉ !

    Ok, je raconte avec distance et dérision alors : comme j'ai pu l'écrire voici plusieurs mois (cf. la note appelée Stimulo), je suis porteur d'un stimulateur cardiaque depuis bientôt 15 ans. Samedi, je me rendais à un contrôle bisannuel en sachant parfaitement que je devrais bientôt m'habituer à l'idée de remplacer prochainement le bestiau, au mois d'avril probablement, car cet appareil un peu magique avait fait son temps. Et comme à chaque fois, une fois bien enduit aux endroits stratégiques d'un gel absolument insupportable (ben oui, vous savez bien, quand c'est fini, on vous file deux pauvres morceaux d'essuie-tout pour enlever ce qui reste mais y en a jamais assez, parce que les médecins, ils vous en badigeonnent dix fois trop, vous vous en foutez plein les doigts sans parvenir à en mettre sur le papier, il en reste toujours et ça colle aux vêtements... c'est aussi pénible que de pisser dans le train... enfin, pour les mecs, hein ?), mon chirurgien commence a scruter les résultats qui tombent de son ordinateur, un peu comme les résultats des courses au PMU. Il analyse les graphiques, empoigne son stylet, me colle un capteur sur la poitrine et commence à vérifier le niveau de charge de la pile. Et là... PAF ! Ecrasé comme une vieille bouse le pace maker !!! Aux abonnés absents et surtout, le voilà qui s'auto-commute en « mode secours », ce qui signifie en langage moins obscur qu'il se met à me stimuler oreillette et ventricules... à l'envers ! Enfin, c'est ce que j'ai cru comprendre après avoir demandé deux ou trois explications techniques que je ne suis pas certain d'avoir bien comprises... Vous imaginez le truc ? Je suis allongé, et mon coeur commence à vivre sa vie tout seul, môssieu fait sa petite crise d'indépendance, il se la joue autonomiste corse (ou basque, ou breton, choisissez, je veux vexer personne), j'ai le rythme qui s'emballe alors que je suis immobile... bref, je suffoque un tantinet, d'autant que je ne suis guère rassuré par les mimiques de mon ange gardien qui cherche une solution, qui cherche, farfouille, commence à perdre doucement son calme légendaire. Aux grands maux les grands remèdes, il arrête tout (une sorte de 'reset' si l'on veut causer façon informatique) pendant que moi, je commence à me demander comment je vais me tirer de cette affaire. Parce que je suis venu en voiture et même si Saxoman a gentiment proposé d'accompagner son père en ces moments particuliers, ben le problème, c'est que le fiston, il a pas le permis de conduire. Alors je vais redescendre comment, moi ? Et j'ai le souffle toujours aussi court, ça devient un peu inquiétant cette histoire... Surtout, je devine qu'il va falloir que je passe sur le billard plus tôt que prévu, c'est pas que ça me fasse peur, m'enfin, c'est pas non plus mon sport préféré...
    Ouf ! Après un redémarrage anxiogène, mon docteur chevronné a pu procéder à la mesure d'urgence : l'arrêt complet du pace maker. Me voici désormais sans filet et condamné à une certaine inactivité physique en attendant l'implantation de son successeur, qu'on me promet de dernière génération, le nec plus ultra dans sa catégorie.
    Une question me taraude néanmoins et je ne manque pas d'interpeller mon spécialiste :
    - Et si mon pace maker s'était commuté en mode secours un dimanche au lieu de tomber en panne ici, en votre présence ?
    - Ben mon vieux, là, vous étiez baisé !
    Et surtout vachement rassuré... Le truc qui est bien dans cette histoire, c'est que je dois rester au maximum chez moi avant l'opération, soit pendant une dizaine de jours. Et que je pourrai, toutes les heures, toutes les minutes même si j'en ai envie, aller bavarder avec ma chaudière qui fonctionne maintenant à merveille, depuis que je l'ai affranchie de son esclavagiste portugais. Et si elle m'écrit : DEFAUT PACE MAKER, je lui en colle une !

  • Rendez-nous Max et Yvette !!!

    Ça faisait au moins dix ans, que dis-je ? vingt peut-être que je n'avais pas regardé l'émission de télévision "Des chiffres et des lettres" ! Les circonstances s'y sont prêtées récemment, puisque ma mère (80 ans) passait quelques jours à la maison et que ce noble programme marque pour elle le début d'un long marathon quotidien qui la conduiront jusqu'au journal de 20 heures, non sans avoir reçu sa dose de "Questions pour un champion" et de "On a tout essayé" (vous savez, cette tablée où des gens pas tous drôles, voire pas drôles du tout, se forcent pour rire aux calembours forcenés d'un l'animateur dont le rire évoque à s'y méprendre le gloussement d'un dindon qu'on aurait violemment électrocuté. Hé ! Ho ! Me prenez pas pour une andouille, je sais très bien comment il s'appelle mais je n'ai pas envie de citer son nom, et toc !).
    Nom d'un chien, quel choc pour moi !
    Tout d'abord, il faut m'excuser, mais je n'y comprends plus rien du tout : dans le bon vieux temps, la règle du jeu était simple... Deux fois les lettres, une fois les chiffres, etc etc... et celui qui avait le meilleur résultat marquait les points. Basta, le match se jouait en deux parties et les vainqueurs suprêmes étaient ceux qui parvenaient à aligner 12 victoires consécutives. Des pros, hein ? Ils avaient un calculateur intégré, deux ou trois dictionnaires en 10 volumes en mémoire et ils vous balançaient un résultat nickel avant même que vous ayez eu le temps de vous rendre compte qu'il fallait commencer à chercher. Aujourd'hui, le principe général est presque le même : deux candidats s'affrontent, y a un gagnant, y a un perdant, les mimiques sont toujours identiques : ah, cette manière ostentatoire de montrer à l'autre qu'on a trouvé le résultat ou le mot le plus long ! Les candidats semblent décalqués sur un modèle éternel (vous savez, le genre pas vraiment épanoui, un tantinet torturé de l'intérieur, une manière de répondre aux questions qui confine à l'autisme... on voit bien qu'ils ne sont pas sur la même planète. Tiens, l'autre jour, y en avait un, complètement débile, il ne demandait que des consonnes... c'est sûr que tu vas en trouver des mots avec une telle méthode, mon kiki... quoique, c'était peut-être notre fameux plombier polonais). Mais le comptage des points, lui, n'a plus rien à voir avec  l'original, qui était une mécanique infernale ! Je me suis aperçu en effet que les deux candidats pouvaient simultanément marquer au score ! Sacrilège ! L'intérêt de l'émission, c'était tout de même qu'un candidat flanque une bonne peignée à l'autre, le prive de ses points quand c'était à son tour de jouer... Grrr, c'est ennuyeux maintenant ! Sans parler de nouvelles phases de jeu totalement inutiles et qui sont de véritables sacrilèges (me demandez pas, j'ai déjà oublié en quoi elles consistent). Et puis, y a même plus la fille qui était payée rien que pour faire tourner les trois molettes de la machine à chiffres. Vous savez, un peu comme dans un casino avec les bandits manchots. Hé, vous vous rendez compte ? Quand on lui demandait ce qu'elle faisait dans la vie, la pauvre, elle devait répondre un truc du genre : "je tourne les molettes pour "Le compte est bon" dans l'émission "Des chiffres et des lettres". C'est vachement dur, faut être tout le temps concentrée surtout qu'après, je dois lire le nombre à trouver". Je me demande ce qu'elle peut bien faire maintenant, peut-être qu'elle a eu de la promotion... par exemple, voix off pour le Kéno, j'en suis presque sûr. Et puis là, y a un sacré boulot... pas sûr qu'elle soit au niveau. Et si ça se passe bien, on lui confiera peut-être le Point Route le vendredi et le dimanche soir, juste pour annoncer que ça coince pour les parisiens du côté de Marne-la-Vallée et du Triangle de Rocquencourt. 
    Mais s'il n'y avait pour m'énerver que ce lifting sans intérêt de mon émission préférée, je passerais volontiers l'éponge... Car le plus grave est ailleurs.
    Où est Patrice Laffont ? Où est passé Patrice Laffont ? Quelqu'un peut-il me répondre ? Comment peut-on imaginer cette émission animée par un autre que lui ? Qui a cru, un jour, pouvoir le surpasser ? Ah moi, je l'aimais bien Patrice Laffont... Avec lui, on sentait que la préparation de l'émission avait dû l'occuper au moins 1 minute 30, c'était un type incroyable, quasiment incapable de terminer la phrase la plus élémentaire sans trébucher sur un voire plusieurs mots (surtout qu'aux Chiffres et aux Lettres, la conversation est tout de même assez limitée). On sentait qu'il s'amusait à s'ennuyer dans cette émission aux rites immuables, la surprise n'existait pas, c'était comme une bulle protégée de toutes les agressions extérieures. Il traînait une sorte de flegme désabusé qui convenait parfaitement au cadre de l'émission : doucement, tout doucement, c'est les candidats qui bossent, pas nous ! Et là, on nous propose un jeune homme avec des lunettes pour faire sérieux, qui a même l'air de croire à ce qu'il fait, genre bon chic bon genre, le petit-fils idéal quoi... Mais ça va pas la tête ? Avec une tête pareille, il est tout juste bon pour présenter la météo ! (Hein ? Qu'est-ce que vous dites ? Ah... il présente effectivement la météo le matin... S'cusez, je savais pas...). Ouste, du balai, on veut pas d'un remplaçant ! Rendez nous notre Patrice !!!
    Par ailleurs, y en a deux autres qui, s'ils sont toujours là (encore que... un beau jour, ces sbires avaient piqué la place de la délicieuse Yvette Plailly et du malicieux Max Favalelli, semble-t-il autorisés à faire valoir leurs droits à la retraite) ne perdent rien pour attendre : Arielle Boulin-Prat et Bertrand Renard (hé, lui, c'est un ancien super-héros, l'avait gagné 12 matches de suite, il trouvait tout, tout, tout... impossible de le coincer). Moi, je les ai connus jeunes et moins replets (je sais, c'est bas comme attaque, mais n'empêche, c'est vrai ce que je dis) et complètement impliqués dans leur truc. Arielle tournait frénétiquement les pages des piles de dictionnaires qu'elle avaient installés sur sa table dès qu'il fallait trouver le mot le plus long. Le fin Renard, lui, en compulsait d'autres et tout l'intérêt de cette épreuve n'était pas le résultat annoncé par l'un ou l'autre des deux candidats boutonneux, mais la compétititon que se livraient nos deux experts. C'était à celui qui aurait trouvé le mot le plus exotique, la définition la plus poétique, voire paillarde si l'ambiance torride du studio le permettait. Rooh, c'était bien. Quant au compte est bon, c'était tout de même incroyable : pendant que les deux agités du bocal entourant Patrice Laffont se torturaient les méninges pour écrabouiller leur adversaire avec fierté, notre Bertrand, mollement avachi dans son fauteuil, l'oeil gauche à demi-ouvert, semblait s'assoupir mais en réalité, avait déclenché les forces incommensurables de sa machine infernale et ridiculisait tout le monde en énonçant tranquillement une miraculeuse solution ayant échappé aux plus névrotiques de la calculette mentale. Tandis qu'aujourd'hui... je n'ose même pas en parler ! Pas étonnant qu'ils se soient empâtés les deux-là ! Font plus rien, ils attendent... Tu parles, ils ont sous les yeux tous les résultats qui leur arrivent, froidement crachés par un ordinateur sournois. Cherchent même plus... Ils se contentent de lire le mot qui s'affichent sur leur écran ou d'énoncer laconiquement la solution aux calculs... C'est un scandale ! Coupez-moi tous ces fils et rapportez les dicos !
    Heureusement, il reste le public : lui n'a pas changé ! Un calme troupeau de personnes âgées, respectueux de la concentration des candidats, claquant délicatement du dentier, et dont l'immobilité finit par être inquiétante. Est-ce que, finalement, ces gens ne seraient pas exactement les mêmes que ceux qui se trouvaient là 30 ans plus tôt ? Comme s'ils faisaient partie du décor, ils auraient été plantés là et, régulièrement, on les arroserait pour qu'ils conservent leur apparence humaine. Et encore, au vu de quelques uns, je me demande si certains d'entre eux n'en sont pas parvenus à un stade où ils s'arrosent tout seuls... (Hé du calme ! C'est une blague, prenez pas ça au premier degré ! Vous savez bien qu'on peut rire de tout... mais pas avec n'importe qui, je vous l'accorde). Grâce à eux, le temps s'est arrêté et j'ai pu m'imaginer, durant une vingtaine de minutes, que j'avais encore 15 ans, que le monde m'appartenait... Et puis non, même en faisant le tour de mon poste de télévision, en regardant derrière (quand j'étais petit, je faisais partie de ceux qui pensaient que les gens qu'on voyait sur l'écran étaient dans le poste... meuh non, c'est pas vrai, je dis ça juste forcer le trait nostalgique), je n'ai rien trouvé pour me rassurer, je me disais que mes vieilles idoles - Patrice, Yvette et Max - attendaient que je les trouve là, bien cachées, pour me faire une petite farce avec leurs mines complices. Personne. Juste des câbles entremêlés, une odeur de plastique chaud...
    Et puis, en entendant le générique de fin (qui, lui, soit dit en passant, est toujours le même), j'ai zappé un peu au hasard et patatras ! La tête de Sarkosy face à moi sur iTélévision... Zut de zut, on était vraiment en 2006... et je ne suis pas pressé d'arriver à 2007 ! Ce monde est trop injuste...
    PS : les puristes me rétorqueront qu'en 1965, au tout début de l'émission, c'éatit Christine Fabréga qui présentait Des Chiffres et des Lettres et que Patrice Laffont n'a débarqué qu'en 1972. Moi, en 1965, je n'avais pas la télévision, je pouvais pas savoir. A cette époque, j'écoutais Coltrane... On peut pas tout faire !

  • Plumeau cru, plumeau cuit !

    Après ma tirade consacrée aux méfaits de certains chauffagistes, laissez-moi temporairement épuiser le sujet de mes relations avec le monde du travail (le vrai, celui avec les mains, pas la clique de ces feignants de travailleurs du cerveau dont je fais partie) en évoquant l'histoire éloquente de notre dernière tentative de recrutement, qui se solda - finalement, ça devient une habitude - par un retentissant échec !

    Le contexte : ayant acheté une maison, le précédent propriétaire, dans sa grande mansuétude, crut bon de nous proposer les services d'une personne chargée chez lui du ménage depuis plus de 20 ans, nous louant la qualité de son travail et son attachement à des murs qui étaient sur le point de changer d'occupants... Il nous proposait en quelque sorte de nous léguer comme par héritage naturel une perle rarissime ! Il aurait même été coupable, selon lui, de se priver de ses inestimables services...

    Halte-là ! Je vous arrête ! Vous imaginez certainement que je vais railler la triste condition des employées de maison, que sournoisement je pourfendrai les travers d'une corporation à bas revenus, qui ne peut pas se défendre face à de si basses attaques ! Point du tout, bien au contraire. Sachez que si les moyens m'en étaient donnés, j'aurais à mes côtés une bonne douzaine d'employé(e)s, totalement dévoué(e)s à ma cause, m'obéissant au doigt et à l'oeil, j'aurais enfin à la maison une dictature personnelle, j'agirais sans le moindre remords dans le simple but de satisfaire une autorité totalement défaillante par ailleurs, dans le cadre professionnel notamment, au détriment d'une équipe qui, bien sûr, n'aurait jamais son mot à dire. L'un(e) nettoierait les sols, l'autre dépoussiérerait, un(e) autre encore lessiverait, repasserait, j'aurais également une manucure personnelle, une cuisinière, je crois même que j'embaucherais quelqu'un(e) uniquement pour faire la vaisselle et nous préparer, après le repas de midi, un ou deux expresso. Sans oublier un jardinier, sensé entretenir à l'année les quelque 100m2 de nos privilèges extérieurs. Cerise sur le gâteau, j'embaucherais une employée de maison dont l'unique tâche serait d'épousseter chaque jour et un à un tous mes disques, sans oublier ces bon vieux vyniles qui nécessitent une attention particulière. Non non non, vous ne m'aurez pas, je ne dirai aucun mal de qui que ce soit, je vous raconte simplement une histoire vraie !

    Ainsi donc nous eûmes, ma femme et moi, l'insigne honneur de rencontrer cette perle rare, au domicile de celui qui allait être notre vendeur (vous m'avez compris, c'était donc là où habitons maintenant) et aussitôt, une première chose nous mit particulièrement mal à l'aise : alors que nous procédions à une sorte d'entretien d'embauche, nous eûmes très vite la sensation que c'est nous qui étions mis sur le grill ! Et puis la chère (on verra plus loin à quel point cet épithète était adapté) dame ne nous regardait pas lorsqu'elle répondait à nos questions bébêtes (vous voyez le genre : ce qu'il faudrait entretenir, à quel rythme hebdomadaire, à quel tarif, bref, du basique). Son regard semblait chercher un ailleurs invisible, mais en général dans une direction très opposée à la nôtre. Bizarre quand même... Puis les choses se compliquèrent : elle exigeait d'être totalement seule dans la maison si elle travaillait pour nous ! Ah bon ? Vous avez quelque chose à cacher ? On n'est donc plus libres d'aller et venir comme bon nous semble dans notre propre maison ? Une exigence d'autant plus compliquée qu'elle nous expliqua très rapidement que quatre heures, au minimum, seraient nécessaires pour laver les sols du premier étage (environ 90 m2) et dépoussiérer les meubles. Une tâche dont nous nous acquittons, nous modestes dilettantes du plumeau, en moins de deux lorsque nous prenons notre temps. Et puis, attention : "Pour laver les sols, je ne prends pas n'importe quel produit, il me faut ceci cela..." Oh ! Oh ! Oh ! Ce sera tout pour votre service, chère madame ? Non, car il y avait encore plus fort !!! Le tarif ! Lorsqu'elle nous eut fait part de ses exigences financières (incluant un nombre assez impressionnant de jours de congés) qui me firent penser qu'elle devait confondre sa situation avec celle d'un footballeur à l'époque du mercato, ma Fraise de fille sortit sa calculette mentale et s'aperçut qu'au rythme de 35 heures hebdomadaires, notre Cendrillon nettoyeuse percevait chaque mois un salaire supérieur à celui d'une jeune agrégée d'anglais. Je veux bien moi, mais faut quand même pas pousser mémère dans les orties, hein ? OK pour défendre la cause de l'artisanat et des tâches manuelles, mais de là à s'endetter à ce point pour un p'tit coup d'aspirateur distrait, pas question.

    Dès le lendemain, j'envoyai à la perle rare un courrier très poli dans lequel je la remerciais de sa proposition mais que, bla bla bla, nous ne pourrions faire appel à ses services. Grand bien nous en prit car les premières semaines consécutives à notre emménagement nous permirent de découvrir que cette passionaria du plumeau entretenait finalement des relations très distantes avec la poussière et la saleté en général. La maison que nous avions achetée, pour charmeuse qu'elle soit, était tout de même à cet égard dans un état de saleté assez déplorable. En 20 ans, il semble bien que de très nombreux recoins et fonds de placards n'avaient jamais eu l'honneur d'une visite, même rapide, de celle qui avait pour mission de les maintenir dans un état de propreté honorable. Je n'évoque même pas les vitres, dont nous crûmes au premier abord qu'elles étaient toutes de "verre cathédrale", probablement pour masquer l'intérieur des lieux aux yeux de voisins trop curieux. Même pas, un premier nettoyage nous démontra qu'il n'en était rien et que, Ô joie, on voyait même la rue et le jardin à travers !!!

    Mais vous savez ce qui est le plus rigolo dans cette histoire ? La dame, oui cette pierre précieuse du lavage multi-fonctions, avait un cousin... chauffagiste, grand spécialiste des chaudières "DEFAUT BRULEUR" ! J'appris très vite qu'il avait un air de famille avec elle, en particulier dans le sérieux de son travail !!! Et l'un comme l'autre sont désormais hors de portée de notre maison...

  • L'OVNI Steve Reich

    Publié à la fin de l'année 2005 et enregistré entre septembre 2003 et mars 2005, "You are (Variations)" est le nouvel opus de ce grand compositeur américain qu'est Steve Reich. Quasiment inclassable, même si certains le rangent assez sommairement au rayon des tenants de la "musique sérielle", notre homme est loin d'être un débutant. On s'en convaincra à l'écoute d'un somptueux coffret appelé "Works 1965-1995" (présenté dans ma petite sélection ci-contre) où toutes les facettes de ce musicien hors normes sont exposées, nous invitant à plonger dans un univers mystérieux et habité par la grâce. Avec un travail sur les rythmes absolument prodigieux - il a en particulier beaucoup étudié les musiques balinaises - Steve Reich sait nous envoûter grâce à un sens inégalé des enchevêtrements et des décalages sonores où piano, choeurs et marimbas occupent une place de choix. Ce disque est composé en fait de deux parties principales : la première en quatre mouvements, intitulée "You are (Variations)" est interprétée par le Los Angeles Master Chorale, sous la direction de Grant Gershon. La seconde, "Cello Counterpoint", est une pièce en trois mouvements pour huit violoncelles, interprétée par Maya Beiser, qui a fait appel pour l'occasion à la technique de re-recording.
    Sans vouloir paraître grandiloquent, je tiens Steve Reich pour un des compositeurs majeurs qu'aura produits le XXe siècle, et il nous prouve avec ce disque que son entrée dans le XXIème se fait sous les meilleures auspices.
    Je me doute bien que cette modeste chronique suscitera moins de commentaires que mes récentes aventures avec une chaudière récalcitrante, mais si je pouvais ne serait-ce que vous inciter à prêter une ou deux oreilles attentives à ces sublimes 40 minutes (oui, je sais c'est court, mais elles sont tellement denses qu'on en ressort aussi ragaillardi qu'après une longue cure énergétique), alors j'aurais gagné un pari : celui de vous embarquer pour un voyage exigeant certes, vous conduisant parfois sur des sentiers escarpés, mais aux rivages enchanteurs et souvent inexplorés.
    Steve Reich ? Un magicien, tout simplement !

    http://www.stevereich.com
      Un concert pour les parisiens : Tehillim (Steve Reich)
    Ictus Ensemble & Synergy Vocals
    Cité de la Musique, Paris - 8 février 2006

  • Chaude hier, froide demain

    A l'heure où une sévère vague de froid en provenance des pays de l'Est commence à déferler sur la France (et en Lorraine tout particulièrement...), au moment où les médias, non sans une certaine gourmandise audimateuse plutôt écoeurante, délivrent tranquillement le palmarès des pays ayant fait le plus grand nombre de victimes ("Eh oui, Paaatrick, la Pologne, après un début de rencontre plutôt terne, est maintenant largement en tête !"), ma chaudière a décrété hier soir sans préavis un nouvel arrêt de travail en m'affichant son désormais célèbre message : DEFAUT BRULEUR ! Oh, c'est quoi ce bazar ? C'est un modèle qui fonctionne très bien en été uniquement ? Le froid ne convient pas à ma madame ? Sa Majesté préfère travailler quand personne n'a besoin d'elle ? (NDLR : j'ai connu jusqu'à une époque très récente des collègues systématiquement présents au travail durant tout le mois d'août, alors qu'il n'y avait rien à faire, et dont le zèle était beaucoup moins perceptible durant le reste de l'année... C'est la preuve que cette maladie est aussi transmissible à l'homme, alors couvrez-vous bien si vous ne souhaitez pas contracter ce drôle de virus...). Nom d'un chien, ça ne va pas se passer comme ça !!!
    Et mon gaz man qui reste silencieux après le lapin posé samedi matin... Bon, je fais quoi maintenant ? D'abord, rester lucide : on éteint la chaudière, on la rallume et normalement, c'est reparti mon kiki ! Et puis, ni une ni deux, on prend son téléphone portable et on appelle SOS brûleur en espérant que le silence des jours derniers ne s'écrasera pas sur une insupportable messagerie vocale. Meuh non ! Monsieur le Docteur ès-gazinières me répond illico, visiblement (enfin, au téléphone, visiblement, c'est une façon de parler, hein, j'aurais pu dire : auditivement) contrarié de sa récente défection. Il me promet, juré craché, si je mens je m'asphyxie au monoxyde de carbone, qu'il sera là demain (donc aujourd'hui, jespère que vous suivez, je ne répéterai pas) en début d'après-midi : 13h30 - 14h, je serai là pour une opération d'entretien !!! Après lui avoir fait promettre trois fois qu'il ne me ferait pas faux bond, je raccroche, non sans avoir cru entendre que mon sauveur ne pourrait venir ce matin parce qu'il devait se faire plâtrer. Et moi, pris dans ma tourmente chauffagique, je n'ai même pas eu la présence d'esprit de lui demander ce qui lui était arrivé. Et ce qu'on devait lui plâtrer. Oui, parce que si ce sont les deux bras, mon gars, c'est pas la peine de venir, je te vois mal assez mal réviser ma nouvelle compagne d'infortune uniquement avec les genoux... Quoique... Etait-ce bien nécessaire de lui poser la question puisque je sais, comme j'ai pu l'écrire récemment, qu'un cumulus vengeur s'était probablement acharné sur lui. Peut-être était-il même préférable de ne pas remuer le couteau dans la plaie, on ne sait jamais, le pauvre est peut-être victime d'un serial ballon d'eau chaude ou un truc dans ce genre.
    En attendant, et tout le monde semble s'en foutre ici, j'ai encore passé une nuit mouvementée, me relevant toutes les deux heures pour vérifier le bon fonctionnement de ma satanée chaudière. N'empêche, à 0h44, alors que la température extérieure était de -3,6°, elle avait encore débrayé, la sournoise, pensant que je ne m'apercevrais de rien ! DEFAUT BRULEUR ! Tu vas voir ma vieille, si ti continues comme ça, tu n'auras pas le moindre jour de congés de tout l'été, tu vas chauffer 365 jours par an et tu me supplieras d'arrêter. Non mais !
    PS : 7h59, mardi 24 janvier 2006. Ma chaudière fonctionne depuis plus de 7 heures consécutives sans renâcler. Le combat continue, l'ennemi est sournois mais je veille !